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Petit Tom et le Crapaud


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Petit Tom et le Crapaud


Par Daniel Leduc

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Site : www.harmattan.fr/daniel-leduc

 

etit Tom habite une cabane au bord de la rivière. Il y habite depuis longtemps, depuis toujours peut-être.
Petit Tom est sans âge : il ressemble à un enfant et à un vieillard tout à la fois. On dirait que le temps n’a pas de prise sur lui.
Petit Tom vit de sa pêche. Elle le nourrit d’abord, et le surplus, il le vend au marché pour pouvoir se vêtir.
Petit Tom se contente de peu. Sa seule richesse : son rire ; il fuse comme une étoile filante ; il illumine le ciel de ceux qui l’entendent.
Petit Tom est un petit homme… heureux.

Aujourd’hui, Petit Tom s’en va aux champignons.
Il a pris un grand sac pour les recueillir (il est optimiste) et un plus petit (on ne sait jamais). Petit Tom voit toujours les choses en grand.

— Pourquoi ne pas voir la bouteille à moitié pleine lorsqu’on en a vidée l’autre moitié ? dit-il souvent.

Mais tout le monde ne comprend pas ce qu’il veut dire ! Et Petit Tom rit devant l’air pantois qu’ont certaines gens.

Petit Tom avance prudemment dans la forêt. Il ne faut pas effrayer les champignons ! Sans quoi ils iraient si bien se cacher qu’on ne les trouverait jamais !

Au cœur de la forêt, dans une clairière, il y a un étang. Et là, au bord de cet étang, vit Joe le crapaud.

— Il n’est pas beau, le crapaud, pense Petit Tom.

— Que penses-tu si fort ? lui demande le crapaud. Tu penses que je ne suis pas beau ? Mais regarde-toi, Petit Tom !

Comment ça ? demande petit Tom.

— Oui, regarde-toi ! Vous les hommes, vous jugez trop vite. Sais-tu que pour nous, les crapauds, ce sont les hommes qui ne sont pas beaux ! Cette protubérance que vous appelez nez, quelle horreur ! Et ces deux machins qui vous servent à entendre, collés comme deux papillons de chaque côté de la tête, quelle horreur ! Et vos bras, comme deux tentacules, qui ne cessent de s’agiter, quelle horreur !

— D’accord ça suffit. Je crois que j’ai compris, soupire Petit Tom.

Et il va pour s’éloigner, quand Joe le crapaud ajoute :

— Tu sais au fond, nous les crapauds, on vous aime bien… Même si vous êtes incapables de faire des bonds…

— Comment ça, incapables ? tempête Petit Tom.

— Parfaitement, incapables de faire des bonds ! insiste le crapaud.

— Eh bien nous allons voir ! s’exclame Petit Tom. Suis-moi jusqu’à la rivière. Je te parie que je la franchirai d’un bond.

Pari tenu ! répond calmement le crapaud.
Et tous deux s’en vont vers la rivière.

Sur le bord de la rivière, Petit Tom se prépare. Il fait quelques mouvements de gymnastique pour assouplir ses muscles ; gonfle le torse pour faire pénétrer plus d’air dans ses poumons ; exécute plusieurs pompes pour s’échauffer encore ; bref, il fait tant et si bien que Joe le crapaud finit par perdre patience :

— Quand tu auras fini de faire ton numéro ! lance-t-il à Petit Tom, peut-être pourras-tu sauter de l’autre côté ? A moins que tu n’aies peur ?!

— Nom d’une pipe, s’étouffe Petit Tom, tu vas voir ce que tu vas voir !

Et il prend son élan pour sauter par-dessus la rivière. Mais alors qu’il en a franchi la moitié, c’est par un grand PLOUF que Petit Tom termine sa course en plein milieu de l’eau. Et le voilà qui nage tant bien que mal jusqu’à l’autre rive. Et le voilà, sur la terre ferme, qui s’ébroue comme un chien ayant essuyé une tempête. Et le voilà qui rit de sa mésaventure tout en ôtant ses vêtements pour les faire sécher. Et le voilà qui dit :

— A présent, crapaud, c’est à toi de sauter par-dessus la rivière !

Alors, lentement, Joe le crapaud s’approche du bord, et sans le moindre élan bondit sur une première pierre, puis de cette pierre sur une autre, et ainsi de suite, jusqu’à l’autre rive.

— Voilà, c’est fait, se contente de dire Joe le crapaud.

Petit Tom applaudit, reconnaissant qu’il a sous-estimé son adversaire. Mais au fond de lui, il ne s’avoue pas vaincu.

— Je te lance un autre défi, dit Petit Tom au crapaud. Serais-tu capable d’aller sur la cime de cet arbre qu’on voit tout là-bas ?

— Pourquoi pas, répond le crapaud.

Et tous deux se dirigent vers un chêne d’au moins dix mètres de haut.

A nouveau Petit Tom s’échauffe. Il s’agite en tous sens. Il fait des sauts, des pompes, des cabrioles… Tant et si bien que Joe le crapaud s’énerve :

— Allons ça suffit ! Vas-tu grimper à présent ? lance-t-il à Petit Tom.

— J’y vais, j’y vais, marmonne Petit Tom, commençant péniblement son ascension.
Il saisit une branche, puis une autre, tire sur ses bras, pousse sur ses jambes, et recommence… Il saisit une branche, puis une autre…

« Oh  hisse ! Oh hisse ! Que cet arbre est haut ! », pense Petit Tom.
Et de fait, cette cime paraît inaccessible, tout là-haut. Plus Petit Tom monte, plus elle semble s’éloigner dans le ciel.

« Oh hisse ! Oh hisse ! »

A mi-hauteur, Petit Tom n’a plus de souffle. Il ne sent plus ses bras, ni ses jambes. A vrai dire, il ne sent plus rien. Il est tout engourdi par l’effort. Il regarde alors en bas, et là, il voit le crapaud en grande conversation avec un pigeon.

« Que peuvent-ils se dire ? », se demande Petit Tom. « Je vais redescendre pour savoir. »

Avec une infinie précaution Petit Tom descend du chêne et s’approche des deux comparses pour écouter. Il entend la fin de la conversation.

Joe le crapaud dit au pigeon :

— En échange je te donnerai des graines.

— On fait comme ça, approuve le pigeon.

Soudain, apercevant Petit Tom, Joe le crapaud lui demande :

— Te voilà bien vite descendu ?

— Je n’ai grimpé que la moitié du chêne, avoue humblement Petit Tom.

— Je le sais, dit le crapaud. Je t’ai observé du coin de l’œil.

— A présent c’est à toi, crapaud. Essaie donc de faire mieux, nargue Petit Tom.

— J’y suis, j’y suis, dit le crapaud.

Aussitôt il saute sur le dos du pigeon qui, d’un coup d’aile, le dépose sur la cime du grand chêne.

— Voilà, je suis là-haut, crie le crapaud.

Et Petit Tom de rire de cette bonne ruse. Et de se dire « toi, le crapaud, tu es plus fin que tu en as l’air ! »

Mais au fond, au fond Petit Tom ne s’avoue pas encore vaincu.

— Un nouveau défi ? demande le crapaud.

— Oui, un nouveau défi, acquiesce Petit Tom. Cette fois-ci je te parie que je descends cette pente là-bas bien plus vite que toi. Nous allons grimper en haut du coteau et nous ferons la course en descendant.

— Allons-y, dit le crapaud.

Petit Tom et Joe le crapaud arrivent au sommet du coteau. Là, Petit Tom va pour s’échauffer, mais avant même qu’il n’ait eu le temps de commencer, le crapaud braille :

— Ah ! non ! ça suffit comme ça ! Et de suite il oblige Petit Tom à s’aligner pour le départ de la course.

Petit Tom démarre en trombe, mais Joe le crapaud ne le suit pas : calmement celui-ci se dirige vers une vieille boîte de conserve, la pousse vers la pente, se blottit dedans, et se met à rouler rouler rouler… aussi vite qu’un ballon. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, Joe le crapaud est en bas du coteau.

Essoufflé, exténué, rompu, Petit Tom arrive peu de temps après.

— Une fois de plus, tu m’as bien eu ! dit-il au crapaud, en haletant. Décidément, tu es le plus fort !

Et Petit Tom se met à rire comme une baleine :

— J’étais parti à la recherche de champignons, et je me suis fait battre à plate couture par un crapaud ! Bon sang ! quelle aventure !

— Tout crapaud que je suis, je ne suis pas laid, car je fais le beau !

En proclamant cela, Joe le crapaud fait un grand sourire, un grand sourire de crapaud.

Et c’est alors que Petit Tom s’aperçoit… que le crapaud… que le crapaud…

Que le crapaud est beau !

 



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