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par l'honorable Docteur Breton :
Balzac et l'introducteur du Swedenborgisme
Un Regulus enfant. A propos d'un témoignage de Gauguin
La Bibliothèque de Marie-Antoinette au petit Trianon
Balzac
et l'introducteur
du Swedenborgisme
Dans Seraphita Balzac place
dans la bouche du pasteur Becker léloge de Swedenborg suivant
:
« Lors de la discussion presque européenne que souleva le
magnétisme animal à Paris, et à laquelle presque tous
les savants prirent une part active, en 1785, monsieur le marquis de Thomé
vengea la mémoire de Swedenborg en relevant des assertions échappées
aux commissaires nommés par le roi de France pour examiner le magnétisme.
Ces messieurs prétendaient quil nexistait aucune théorie
de laimant, tandis que Swedenborg sen était occupé
dès lan 1720. Monsieur de Thomé saisit cette occasion
pour démontrer les causes de loubli dans lequel les hommes les
plus célèbres laissaient le savant Suédois afin de pouvoir
fouiller ses trésors et sen aider pour leurs travaux."Quelques-uns
des plus illustres , dit monsieur de Thomé en faisant allusion à
la Théorie de la Terre par Buffon, ont la faiblesse de se parer
des plumes du paon sans lui en faire hommage". Enfin, il prouva par des
citations victorieuses, tirées des oeuvres encyclopédiques de
Swedenborg, que ce grand prophète avait devancé de plusieurs
siècles la marche lente des sciences humaines : il suffit, en effet,
de lire ses oeuvres philosophiques et minéralogiques pour être
convaincu. dans tel passage, il se fait le précurseur de la chimie
actuelle [...] ; dans tel autre, il va par quelques mots au fond des mystères
magnétiques, il en ravit ainsi la première connaissance à
Mesmer. » 1
Lappareil critique de la collection de la Pléiade, toujours passionnant,
précise que lintervention du marquis de Thomé « se
trouve rapportée par Tafel dans Collection de documents concernant
la vie et le caractère dEmmanuel de Swedenborg, Tübingen,
1839, n°45 p.422 et citée par Paule Bernheim (op. cit. p.53 [Balzac
und Swedenborg]) sous le titre : Remarques du marquis de Thomé
sur une affirmation [à propos des enquêteurs sur le mesmérisme]
citée par les auteurs du Journal encyclopédique et mise
dans le cahier de septembre 1785, tome VI, partie 2, p.310 et sq. En fait,
Balzac na pas trouvé sa documentation dans cet ouvrage de Tafel
qui est postérieur à Séraphita, mais sans doute
à la source même où Tafel a puisé le Tableau
analytique et raisonné de la doctrine céleste [...] et la Nouvelle
Jérusalem ou Précis des oeuvres (théologiques) dEmmanel
Swedenborg, Londres et La Haye, 1786, p.245. Cet ouvrage anonyme est de
B. Chastanier selon Barbier. » 2
Les ouvrages du marquis sont :
De lEnsemble ou Essai sur les grands principes de ladministration,
Paris, Gattey, 1788.
LEsprit des cahiers présentés aux Etats généraux
de lan 1789... Projet complet régénérateur,
juin 1789, deux tomes en un volume.
Lettre à M. de Bailly, maire de Paris, par un de ses disciples,
Paris, 1791.
Ils sont loeuvre dun aristocrate éclairé.
Dans Les Elections et les Cahiers de Paris en 1789 3
est notée une trace de son activité politique : « M.
le Président a nommé alors les eux députations qui doivent
porter aux deux ordres larrêté pris par la noblesse : le
duc dAyen, MM le marquis de Clermont dAmboise, le comte de Chabaillant,
le comte de Vaubecourt, le marquis de Thomé, Duport, de Malaric et
Savalette de Lange, ont été nommés par le Clergé ».
Son nom apparaît sur la liste des émigrés. Nous apprenons
ainsi un surnom : « Reutilly », sa « dernière
profession : officier aux gardes », sa « situation des
biens : département Seine-et-Marne », districts : Melun
; municipalité : Pont-Carré ». la colonne « dates
des arrêtés ou Listes des départements qui ont constaté
lémigration » porte la mention : 19 juillet 1793 ».
4
La Bibliothèque historique de la ville de Paris possède la trace
de sa libération de la maison darrêt de Picpus en date
du 5 octobre 1794 :
Convention Nationale. Comité de surté (sic) générale
de la Convention Nationale.
Du 14 vendémiaire lan 3 de la République Française,
une et indivisible.
Vu les pièces relatives au citoyen René Thomé, sa femme
et ses 2 filles mineures, toutes (sic) quatre détenus à Picpus.
Le Comité arrête que les sus nommés seront mis en liberté
au vu du présent et les scellés levés. [...] »
5
Une autre pièce darchives, numérotée folio 459,
prouve sa radiation de la liste des émigrés en date du 23 décembre
1794 :
« Extrait des registres de délibération du comité
de législation. Du 3 nivôse lan 3e de la
république une et indivisible.
Le Comité de législation en vertu de lautorisation qui
lui a été donnée par le décret de la Convention
nationale du 25 brumaire dernier.
Vu la pièce à lappui de la réclamation du citoyen
Thomé.
Considérant quil a justifié à ladministration
du département de Seine et Marne de sa résidence sans interruption
sur le territoire de la République depuis le 6 août 1791 jusquau
6 août 1793 dans la forme et le temps prescrits par les articles 2 du
titre premier et sept du titre quatre de la loi du 25 brumaire dernier sur
les émigrés et obtenu en conséquence de la dite administration
un arrêté de radiation provisoire du 9 septembre 1793 dans lequel
les pièces justificatives sont visées.
Arrête que le nom du citoyen René Thomé sera rayé
de toutes les listes démigrés, où il pourrait avoir
été inscrit ; que le séquestre apposé sur ses
meubles et immeubles sera levé et quils lui seront restitués
ou le montant diceux suivant le prix de la vente dans le cas où
ils auraient été vendus, à la charge du dit Thomé
de payer tous les frais du dit séquestre que de la dite vente, et sauf
encore à lui de continuer à justifier de sa résidence
sur le territoire de la République depuis le 6/8/1793 date du certificat
à lui délivré par la Commune de Paris et par lui produit.
A leffet de quoi expédition du présent arrêté
à la minute duquel demeurent jointes les pièces justificatives
sera adressée au département de S et Marne, et à la Commission
des revenus nationaux pour être par eux exécuté chacun
en ce qui les concerne ainsi que pour tous autres départements où
le citoyen René Thomé peut avoir des biens situés sur
la simple notification qui leur sera faite.
[Les signatures suivent.]
Nous connaissons les états de service du marquis de Thomé avant
la Révolution :
« Admis dans les Mousquetaires du Roi, 2ème compagnie le
1er août 1750.
2ème enseigne du Régiment des Gardes françaises le 21
mai 1752. 6
1er Enseigne le 26 octobre 1755.
Sous-lieutenant le 19 février 1759.
Lieutenant le 10 septembre 1769.
Rang de colonel le 17 mai 1772.
Capitaine en second le 16 avril 1780.
Capitaine de fusiliers le 15 décembre 1782.
Brigadier le 1er janvier 1784.
Maréchal de camp le 9 mars 1788.
Maintenu au commandement de sa compagnie le 1er avril 1788.
Licencié avec le régiment le 31 août 1789.
Campagnes : 1760 à 1762 Allemagne.
Décorations : Chevalier de Saint-Louis le 17 juin 1770. »
Le Journal encyclopédique
de lannée 1785 dont il est question un peu plus haut contient
des « Remarques sur une assertion des commissaires nommés
par le Roi pour lexamen du magnétisme animal, etc., communiquées
aux auteurs de ce journal ».
Le texte du marquis de Thomé comporte un post-sriptum :
« Je viens de lire, Messieurs, dans La Gazette de Leyde
quà Londres ceux qui ont adopté la doctrine de Swedenborg,
ont formé une société adonnée à létude
de ses ouvrages et à leur propagation. On ajoute que cet auteur a aussi
un assez grand nombre de partisans en France, et quils y sont conus
sous le nom de martinistes. Ce que M. Mercier a dit sur ce sujet dans son
Tableau de Paris, a vraisemblablement induit en erreur les étrangers
qui auront cru pouvoir sen rapporter à lui. Cependant M. Mercier
a été on ne peut plus mal instruit à cet égard,
étant absolument faux que les Martinistes soient partisans de Swedenborg.
Il ny a de commun entre ces deux doctrines que la croyance en Jésus-Christ
et conséquemment à lâme ; elles diffèrent
dans tout le reste. Dailleurs, autant les connaissances de lillustre
Suédois sont étendues et toujours accompagnées de démonstrations
autant celles des Martinistes sont bornées et couvertes du voile du
mystère. ».
Les archives de Paris ont conservé ce document :
« Du 6 Brumaire an 14. Enregistré testament de M. René
Thomé ancien maréchal de camp décédé le
dix-neuf Fructidor an treize rue des Francs-Bourgeois N°18. 8° arrdt
Portant dun legs à Dame Marie Henriette Leclerc de Grandmaison
son épouse de lusufruit pendant sa vie de la portion [qui lui
permet] de donner sa terre de Reutilly consistant, tant en bois situés
sur les territoires de Pontcarré et de Roissy quen deux fermes
et des objets endedans et en dehors de son enclos quil exploite par
ses mains. le tout situé dans le département de la Seine et
Marne il entend que le présent napporte de changement à
un antérieurement ce quil confirme quautant quil
sera nécessaire dêtre modifié. »
L'honorable
Docteur Breton se fera
un plaisir de vous répondre !
1 -
Seraphita p.70, éd. Gründ, s.d.
2 - Tome XI, collection de la Pléiade, p.1648, notes de la page 765
3 - P.151, édition 1889, cote Bibliothèque historique de la
ville de Paris 8° H 93
4 - Les Emigrés de 93, édition Micheline Vallée, [1993]
5 - Manuscrits 1213, folios 389 à 783, folio 458
6 - Les Gardes françaises étaient le corps délite
chargé de garder les avenues des lieux où le roi résidait.